jeudi 5 septembre 2013

C'est pas Lui que mon cœur a choisi

Ça faisait longtemps qu'on n'avait pas acheté le magazine Lui. D'ailleurs, on ne l'avait jamais vraiment acheté, on se contentait de le piquer dans le tiroir des parents des amis, puis, fasciné, on lisait – hum, pardon: on "dépliait". Et l'excitation venait moins de la vision, souvent décevante, de la "fille" ainsi dépliée, que du dépliement lui-même, un acte qui nous permettait de croire quelques instants qu'une revue pouvait être plus grande à l'intérieur qu'à l'extérieur. Il y avait aussi des gens qui écrivaient dedans, comme Truffaut, et de longs entretiens, des hommes politiques se livrant le temps d'un cahier… et bien sûr de la "fesse". C'était il y a bien longtemps, puisque Lui est sorti pour la première fois en 1963, sous l'anti-chienlit. Quand libération sexuelle et sexisme ordinaire flirtaient encore sans trop savoir où tout ça allait. Un magazine propice à la jeune paluche où l'on pouvait lire néanmoins des propos de Sugar Ray Robinson. Moins instructif qu'Union mais plus glamour que Télé 7 Jours.
Or voilà que, de cendres grises qu'on croyait changées en poudre blanche, Lui renaît, sous la houlette de Frédéric Beigbeder, qui se fend d'un cheap édito troisième degré porte à gauche (mais n'ouvrez pas la porte, elle donne sur le premier degré…), dans lequel il nous explique que le Mec, ce dinosaure, a grâce à lui "son" magazine (mais le Mec en question est, nous précise-t-on, "ami des gays": ouf, il n'est donc pas complètement beauf et macho).
Quoi d'autre? Ah oui, il y a un peu plus de page pub qu'en un an de diffusion TF1 et on trouve même la photo d'un bonnet Lacoste en laine (40 euros, soit le prix d'un cerveau à Interbeigbeder). Certes les contributeurs sont des plumes, mais d'un genre qu'on devine arrachées à de très las fondements: Simon Liberati, Nicolas Rey, Patrick Besson… Il y a même deux pages sur les livres qui parviennent assez aisément à n'en pas parler, non mais Viviant allô quoi! Côté "filles à épingler", c'est du très soft, ça manque de pathos (sauf à écrire le mot "pataud"). Bon, d'accord, il y a Léa Seydoux en couve, mais sur les photos à l'intérieur eh bien on a plutôt l'impression qu'elle fait la promotion des vieux parquets. Quant à l'acteur Tahar Rahim, piégé ici, il est interrogé sur sa santé physique. Gros scoop : il n'a pas d'allergies.
Allez, soyons positif. On trouve au moins une phrase à mourir de rire p.115: il s'agit des propos d'un trader aux narines encombrées: "Il n'y a pas plus de cocaïne dans la finance que dans d'autres secteurs. La différence, c'est qu'on a plus d'argent, donc en prend plus." CQFD. Relisez, vous ne rêvez pas. Et puis, tant qu'à faire, remplacez "cocaïne" par "indigence" et "finance" par "Lui". Ça vous évitera de gaspiller 2,90€.

2 commentaires:

  1. Pour plus de lol : http://m.vice.com/fr/read/le-magazine-lui-version-2013-est-l-ennemi-des-femmes-et-des-hommes-civilises/?utm_source=vicefb

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  2. Je ne vois pas ce que "Elle" pourrait envier à "Lui"....

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