jeudi 4 avril 2013

Serpentins et vorticettes (with a zest of Cimino)

On avait repéré cette merveille tartiforme sur le site d'Hélène Morice, foliealdente : le serpentin de légumes et jambon. Après quelques secondes consacrées à la salivation, on s'était promis d'en reproduire sinon le camaïeu, du moins l'esprit ombiliqué. On a remplacé le duo courgette/carotte par un combo courgette/aubergine, troqué la crème roquefort par un petit liant moutardé, et oublié l'aoste pour du prosciutto. De quoi s'agit-il donc? Faites un fond de tarte brisé que vous ferez précuire dix-minutes pour assurer la bonne étanchéité de cette roue destinée à faire tourner les têtes affamées. Pendant ce temps, à l'aide d'un économe assez large, prélevez de fines lanières de courgettes et d'aubergines sur les légumes éponymes. Faites cuire quelques minutes vos lanières d'aubergines au four, personne ne s'en plaindra. Commence alors l'assemblage. Hélène pratique la technique du rouleau virtuose, mais, petit joueur, on a procédé par lente colimaçonnade. En partant de l'extérieur, on a disposé nos lanières en partant de l'extérieur, en alternant aubergine, courgette, fromage (brebis), prosciutto, jusqu'à épuisement de l'espace investi. Puis on a nappé le tout par éparses louchées de notre petite crème relevée. Salez, poivrez, la disque est prêt à chanter. Une gourmande demi-heure au four, et on peut servir la bête avec une roquette et des cœur-de-bœuf passées au grill, par exemple. S'il en reste dans les assiettes, c'est que vos hôtes sont morts entretemps de contentement.
On a poussé le vice jusqu'à baptiser la chose "vorticette", en s'appuyant sur le latin, vortex, avec dans l'idée celle d'interprétation spiroïdale  tendant à montrer une description de l’infini, tant qu'à faire. On a aussi pensé à ces vers d'Hugo Victor: Ce tourbillon sombre et rapide, / Qui roule une voile en ses plis. Puis on s'est rué sur la glace au beurre salé et on a regardé The Deer-Hunter parce qu'on aime beaucoup l'œil du cerf qui convulse dans la brume pennsylvanienne, "Can't Take My Eyes Off You" chanté par Frankie Valli, le petit rat gris qui court sur les prisonniers américains, le bonnet de De Niro, les larmes refoulées (ou pas) de Meryl Streep, l'ersatz de sourire sur les lèvres de Walken, accompagné d'un haussement d'épaules décentré – bref, une poignante réécriture du Magicien d'Oz, avec Michael dans le rôle du bûcheron, Nick dans celui du lion, Steven dans celui de l'épouvantail, et Dorothy restée au bercail sweet bercail. Et le Magicien, direz-vous? Ben, c'est Cimino, les gars.


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