vendredi 9 novembre 2007

Yasser Arafat m'a regardé et m'a souri


C'est le titre d'un texte de l'écrivain libanais Yussef Bazzi qu'a traduit l'écrivain Mathias Enard (photo B/W ci-contre), Enard le trublion polyglotte vivant à Barcelone, un ami pour la vie, auteur de deux romans retournants chez Actes Sud. Grâce à lui, et aux éditions Verticales qui donnent un punch certain à ces Belles Etrangères qui ont cette année pour arbre un Cèdre à la fois fort et fragile, on pourra lire ce récit d'une enfance armée/désarmée, l'apprentissage de la conscience et l'émergence de la poésie.

«Été 1981. J’ai quatorze ans. Mahmoud al-Taqi inscrit mon nom dans le registre avant de m’accompagner au dépôt. On me remet une paire de rangers, un uniforme kaki, une ”tornade rouge” (l’insigne du Parti) à mettre sur l’épaule, une ceinture avec trois chargeurs, deux grenades et une kalachnikov, dont l’extrémité du canon – acier russe, 11 mm de diamètre – est sciée. Je suis affecté aux Forces centrales d’intervention du Parti social nationaliste syrien à Beyrouth. Le salaire est de 600 livres libanaises et un paquet de cigarettes par jour.»

Yasser Arafat m’a regardé et m’a souri est le journal d’un combattant précoce durant cinq années de guerre civile libanaise, le livre cicatriciel d’un ex-enfant-soldat. Bref récit fragmenté, à l’écriture blanche et visuelle, il entraîne le lecteur sur les talons d’un gosse qui vit d’abord la guerre comme une escapade, ce qui le conduit à éprouver la part la plus irréelle du réel. C’est aussi le texte brut et pacifié d’un poète qui s’engage dans la prose sans rien renier des puissances secrètes de sa langue.


(Traduction et postface de Mathias Énard. )

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